Aaah, la documentation... Étape essentielle si l'on travaille sur toute fiction un tant soit peu historique. (Or, mon roman Birth of a Pirate a beau être basé sur une trilogie de films qui comporte des messieurs à face de poulpe, des pirates zombies et des malédictions aztèques, il n'en reste pas moins que le cadre spatio-temporel, lui, est réel : l'Europe, l'Afrique et les Caraïbes au début du XVIIIe siècle.)
Lorsque j'ai commencé à écrire, la documentation, je n'en avais pas grand-chose à faire (et encore, ceci est un euphémisme). J'écrivais sans rien connaître de plus que les trois films de Verbinski, et je m'en contentais très bien. Et du coup, sans le savoir, j'agrémentais mon récit de tout un tas de petites (voire grosses) incohérences historiques. Ce n'est qu'en commençant un long travail de relecture quelques années plus tard que je m'en suis rendue compte. Quoi, toute une partie de mon histoire se passe au Ghana alors que le Ghana n'existait pas en 1710 ? Comment ça, la durée d'un voyage entre l'Angleterre et l'Afrique de l'Ouest ne dure pas seulement deux malheureuses semaines ? Ah tiens, les concepts d'antisepsie et d'infection bactérienne n'étaient pas encore connus à cette époque ?
Alors je me suis dit qu'il fallait remédier à tout ça – et j'ai commencé à faire des recherches. Je craignais que ce soit un brin fastidieux (après tout, je n'ai jamais été intéressée par mes cours d'histoire au lycée...), mais en fait, ça m'a plu, et pas qu'un peu. Parce que c'étaient des sujets qui m'intéressaient. J'ai toujours été fascinée par l'univers de la piraterie, je voue une passion sans bornes à la marine ancienne, je suis une grande curieuse de l'histoire de la chirurgie ou de l'évolution du système judiciaire au fil des siècles... Alors quand j'ai parcouru des sites Internet et des bouquins (Google Books et la bibliothèque municipale de ma ville sont mes amis) à la pelle pour glaner des infos, j'ai appris un tas de choses passionnantes.
J'ai exploré la vie quotidienne des marins à bord des navires à voile, et celle des colons sur les îles des Indes Occidentales. J'ai lu des pages et des pages sur l'organisation de la East India Company, sur les principaux repaires de pirates au XVIIIe siècle ou sur le fonctionnement du commerce triangulaire et de l'esclavage. J'ai appris en détail comment on soignait une blessure par balle dans les années 1700, à quoi ressemblaient les comptoirs britanniques fortifiés sur les côtes africaines, quels étaient les différents grades ou les différents châtiments corporels en usage au sein de la Royal Navy. J'ai étudié en long, en large et en travers des centaines de pages Wikipedia, des dizaines d'extraits de bouquins (d'époque ou non) et de sites spécialisés, des centaines de peintures, de gravures ou d'illustrations qui représentaient la réalité de l'époque.
Évidemment, du coup, j'ai appris un nombre de choses assez conséquent. Au final, à peine 10% du fruit de ces recherches figurera tel quel dans Birth of a Pirate. Ce qui, je l'admets, est assez frustrant. Lorsqu'on maîtrise bien un sujet, on a toujours envie de caser tout ce qu'on sait – mais c'est là le danger de la documentation. On écrit un roman, pas une leçon d'histoire. Il faut arriver à disséminer dans notre histoire un petit détail par-ci par-là, qui donneront une impression globale de "Tiens, cette fille sait de quoi elle parle". Un nom de lieu, la description d'un endroit précis, quelques termes techniques de la marine à voile... Le tout sans tomber dans l'étalage de culture (vous savez ce qu'on dit, c'est comme la confiture... Moins on en a, plus on l'étale).
En ce moment, je suis en pleine relecture de mon roman, et étant donné que j'ai beaucoup plus de connaissances sur tout un tas de sujets qu'auparavant, je suis toujours tentée de rajouter plein de détails dans chacun de mes chapitres (notamment ceux qui traitent de l'esclavage, puisque leur premier jet manquait franchement de précisions). J'essaye constamment de trouver le juste milieu entre ne rien dire et trop en dire. Pas si simple ! (Quand je lis The Price of Freedom d'Ann Crispin, je me dis régulièrement que l'auteur a sans aucun doute fait de grosses recherches. Et pourtant, elle ne raconte pas grand-chose de purement historique dans son bouquin - mais c'est l'impression qui en ressort, et c'est à ça qu'il faudrait arriver.)
Alors voilà – Birth of a Pirate m'aura permis non seulement de progresser en matière d'écriture, mais m'aura aussi permis de devenir une experte ès piraterie et navigation option XVIIIe. (Maintenant, je n'ai plus qu'à mettre la théorie en pratique en embarquant sur un vieux trois-mâts pour une croisière autour du monde. Ma vie sera alors complète.)
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